Monsieur le Président pro tempore de la CARICOM l’Honorable Philip DAVIS
Monsieur le Premier ministre de la Jamaïque, l’Honorable Andrew HOLNESS
Monsieur Kenny ANTHONY chairman du Groupe des Éminentes Personnalités de la Caricom
Madame la Secrétaire Générale de la Caricom
Mesdames, Messieurs les ministres
Chers compatriotes représentants les partis politiques, la société civile et du secteur privé
Chers invités,
Mesdames, Messieurs
Permettrez-moi de commencer par remercier notre hôte, le Premier ministre Andrew HOLNESS pour l’intérêt qu’il porte à la cause haïtienne, pour son hospitalité et pour l’accueil chaleureux qu’il a réservé à la délégation qui m’accompagne et à l’ensemble des mes compatriotes ici présents.
Mes remerciements vont aussi à l’Honorable Philip Davis qui, pendant sa présidence de la CARICOM a mis la question haïtienne en bonne place dans l’agenda de l’institution communautaire.
J’exprime également ma gratitude à la Secrétaire générale et à son équipe dynamique qui ont réussi à surmonter bien des difficultés pour organiser cet évènement.
Depuis mon arrivée à la tête du gouvernement, j’ai pris l’engagement d’aller à la rencontre de tous les secteurs de la vie nationale et d’entamer un dialogue, pour trouver dans la concertation, les voies et moyens en vue de remettre la démocratie sur les rails en créant les conditions pour que le peuple haïtien puisse choisir librement ses dirigeants. C’est ce que j’ai fait et c’est ce que je continue de faire régulièrement.
Il n’est pas question de refaire ici l’histoire de cette dernière période bouleversée qui causé tant de douleur et de peine pour mes compatriotes. Ceux qui sont là sont témoins des efforts consentis inlassablement, pour parler aux uns et autres en vue de construire des consensus aussi larges que possible, avec toutes celles et tous ceux qui le voulaient bien. Vous les amis de la CARICOM, qui tentez aujourd’hui cette démarche de facilitation, vous devez savoir que pendant ces vingt derniers mois nous avons discuté, négocié et convaincu des acteurs politiques et de la société civile qui comptent en Haïti, à signer le 11 septembre 2021un Accord Politique Pour Une Gouvernance Apaisée et Efficace De La Période Intérimaire.
Plus d’un nous ont demandé d’élargir le consensus, ce qui correspondait à notre vision de la meilleure façon de résoudre les différends politiques. J’ai repris mon bâton de pèlerin et avec l’ensemble du gouvernement, nous avons convaincu d’autres acteurs politiques, de la société civile et chose inhabituelle des acteurs majeurs du secteur privé à nous rejoindre en signant le 21 décembre 2022 un document appelé Consensus National Pour Une Transition Inclusive Et Des Élections Transparentes. Certains compatriotes n’ont pas souhaité rejoindre le mouvement, mais ce nouvel accord a permis de franchir un cap, avec la mise en place du Haut Conseil de la Transition. Mais il est depuis devenu plus difficile de poursuivre le dialogue avec certains acteurs qui refusaient le débat et encore moins la concertation.
Le Haut Conseil de la Transition, dans le cadre de sa mission qui est entre autres de chercher à élargir le consensus, a organisé les 23 et 24 mai 2023, un Forum Politique sur la sécurité, les réformes constitutionnelle et électorale, la bonne gouvernance et le mesures économiques et sociales. En terme de participation ce fut un succès, même si certains compatriotes, toujours les mêmes qui étaient conviés ont refusé une fois de plus le dialogue. De ce forum est sortie une déclaration conjointe demandant au gouvernement d’aller de l’avant et de créer les conditions pour aller vers des élections générales.
Dans mon discours de clôture de ce Forum, j’ai une fois de plus tendu une main fraternelle à tous mes compatriotes de bonne volonté, à tous les démocrates de mon pays, pour qu’ensemble nous franchissions les prochaines étapes devant nous conduire à un retour rapide vers le fonctionnement normal de nos institutions démocratiques.
Permettez-moi de faire un petit reproche amical à mes amis de la Caricom. Andrew a fait le déplacement à Port-au-Prince, mais le Groupe des Éminentes Personnalités que je me faisais un plaisir d’accueillir en Haïti, n’ont pas répondu à l’invitation de participer au Forum Politique. Mais je suis certain que ce n’est que partie remise et que très bientôt, ils nous rendront visite. Je saisis l’occasion pour féliciter la CARICOM qui a réussi à convaincre les uns et les autres à venir ici dans cette belle ville de Kingston pour recommencer à dialoguer. Monsieur le Président Madame la Secrétaire Générale, grâce à vos efforts et à votre détermination, vous avez pu convaincre les uns et les autres que la solution durable pour Haïti passait par le dialogue et le sens du compromis. Ceci constitue un premier pas. J’espère qu’il y en aura d’autres qui nous permettront de franchir ensemble les étapes vers le renouveau de notre pays.
Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs,
Je suis venu ici au nom du gouvernement que j’ai l’honneur de diriger, non pas pour régler des comptes et encore moins pour des reproches à quiconque. Certains pensent que l’exercice que nous allons faire ici est inutile et ne mènera à rien de tangible en plus, parce nous venons de faire la même chose il y a deux semaines à Port-au-Prince et que nous ne pouvons pas continuer indéfiniment à négocier et à discuter. Mais moi, je crois que chaque fois que des haïtiennes et des haïtiens veulent s’asseoir pour discuter pays, il faut toujours répondre présent.
Tout le monde sait qu’aucune solution durable pour Haïti ne saurait venir de l’étranger, ni être imposée par d’autres, qu’ils soient de la CARICOM ou d’ailleurs. Il incombe à nous haïtiennes et haïtiens de trouver entre nous, par nos propres moyens, ce projet national commun susceptible de nous unir pour une renaissance de cette nation.
Nous ne sommes pas venus ici pour recevoir des diktats de quiconque. Nous ne sommes pas venus ici pour négocier un nouvel accord en plus. Nous sommes là pour nous entendre avec entre compatriotes qui ont à coeur l’intérêt national, sur les prochaines étapes dans la marche vers la reconstruction de notre démocratie. Nous sommes entre nous, avec nos frères de la CARICOM, nous pouvons sereinement nous dire certaines vérités en face, sans nous fâcher pour autant.
Certains d’entre nous voulaient accéder au pouvoir sans passer par les élections et ont même coopté un président de la république et choisi un nouveau premier ministre. Pour eux, c’était ça la meilleure solution. D’autres dont je fais partie ont pensé que la solution durable pour notre pays passait par la création d’un environnement sécuritaire propice pour redonner la parole au peuple haïtien en vue de choisir librement les femmes et les hommes auxquels ils veulent confier la direction du pays.
Deux approches apparemment contradictoires, qui semblent irréconciliables, mais visant tous les deux, je veux le croire, l’intérêt du pays. Il est venu le temps de mettre toutes ces querelles derrière nous et d’aller de l’avant. Lutter pour le pouvoir dans ces conditions, et quel pouvoir, un pouvoir éphémère à exercer dans conditions horriblement difficiles. Et dire que tous ces débats se déroulent sur fond d’une insécurité désarmante, de catastrophes naturelles, de résurgence du choléra, d’un environnement international instable, d’une inflation galopante.
Le prix payé par les plus vulnérables, par les plus démunis est trop élevé, beaucoup trop élevé : les enlèvements contre rançon, les assassinats sommaires, le blocage des routes qui empêchent la libre circulation des personnes et des biens, l’insécurité alimentaire qui frappe près de la moitié de notre population soit plus de cinq (5) millions parmi les nôtres.
Non nous n’avons plus le droit, ni le temps pour tergiverser davantage. Il nous faut un kombit national pour sortir notre pays de cette spirale infernale. Haïti doit impérativement recommencer à fonctionner comme pays normal. Vous ne savez pas comme il est pénible pour un dirigeant haïtien, de participer à des rencontres internationales au niveau de la CARICOM ou ailleurs et devoir encore et toujours parler de la crise et des malheurs qui accablent notre pays, au lieu de nous pencher sur les questions économiques, sur notre potentiel touristique, sur la meilleure façon d’attirer les investissements créateurs d’emplois pour nos jeunes qui sont obligés de fuir leur pays.
Cela fera bientôt deux ans depuis que nous sommes dans cette transition. Il est plus que temps d’engager, le processus qui doit nous conduire vers des élections libres, démocratiques et inclusives. Certains me prêtent à tort une volonté de perdurer au pouvoir. Si les démarches entreprises par le gouvernement avaient abouti, si tout le monde avait apporté sa pierre à l’édifice, nous aurions dû être actuellement en période électorale, parce que nous aurions eu le temps de revoir notre constitution et de mettre un Conseil Électoral Provisoire en place.
L’engagement a été pris devant la nation, de procéder à un remaniement au sein du gouvernement. Ce sera fait. La promesse a été faite de procéder à des réformes au niveau de la haute administration publique. Ce sera fait. Des changements significatifs ont été annoncés pour mettre de l’ordre dans la diplomatie. Ce sera fait. La garantie a été donnée que certains agents intérimaires dans les collectivités locales seraient remplacés, ça aussi sera fait. Avec le Haut Conseil de la Transition nous avons donné l’assurance que le Conseil Électoral Provisoire serait constitué, avec des personnalités proposées par divers secteurs de la vie nationale. Nous le ferons bientôt, car nous devons apporter la preuve à nos compatriotes, que nous sommes sérieux quand nous disons que nous voulons redonner la parole au peuple pour le choix de sa destinée.
Aujourd’hui une fois de plus, au nom du gouvernement, je tends une main fraternelle à chacun de vous et je vous invite à venir travailler avec nous, pour conduire ensemble tous ces changements que je viens de mentionner.
Bien entendu, tout le monde ne pourra pas avoir un portefeuille ministériel. Mais nous pouvons faire beaucoup de choses ensemble dans l’intérêt national. J’ai besoin du soutien de tous, ou du plus grand nombre pour combattre l’insécurité et rassurer les pays frères qui envisagent de venir en aide à nos forces de sécurité.
Nous avons besoin d’un consensus national pour éradiquer la corruption, changer les mentalités et inculquer aux uns et aux autres des notions de civisme fiscal et de civisme tout court. Nous avons entamé des réformes dans le secteur financier. Les résultats commencent à se faire sentir avec les recettes douanières qui sont en constante augmentation. Avec l’appui de tous et de chacun nous pouvons faire encore mieux.
Nous allons vers des élections générales. Il faut que la population ait confiance dans le processus, qu’elle se l’approprie et qu’elle ait l’assurance que ses votes seront comptés. C’est la condition sine qua non pour qu’il y ait un fort taux de participation en vue de garantir une légitimité certaine aux futurs élus.
Mesdames, Messieurs, Chers compatriotes,
Venez travailler avec le prochain Conseil Électoral Provisoire sur la reconstitution des structures de l’appareil électoral. Venez réfléchir avec nous sur un mécanisme de financement des partis politiques et des candidats. Venez contribuer au rétablissement de la paix sociale. Venez discuter avec nous d’infrastructures, d’énergie renouvelable, d’autosuffisance alimentaire, d’éducation. Nous vous attendons. Haït a besoin de la contribution de toutes ses filles, de tous ses fils
Il nous a fallu sortir d’Haïti pour nous rencontrer. J’espère vivement que cette rencontre soit un succès et constitue un prélude à d’autres encore plus fructueuses, car nous avons beaucoup de sujets autour desquels nous devons construire des consensus suffisants.
Je demande à vous toutes et à vous tous, que vous ayez adhéré ou non au consensus du 21 décembre ou que vous n’ayez signé aucun accord, je vous demande de mettre à profit ces journées de discussion pour travailler dans un esprit de collaboration, en toute bonne foi avec une volonté d’aboutir. Tâchez autant que possible, de garder toute la sérénité que requiert la gravité de la situation de notre pays. Le peuple a les yeux fixés sur nous et attend que nous nous mettions d’accord sur l’essentiel. Pas sur un accord de plus, mais sur des actions concrètes pour aller de l’avant et le sortir du marasme et de la misère abjecte.
Je vous dis bon travail. Je vais vous laisser discuter en toute tranquillité. Je serai présent avec vous pendant ces deux journées de travail et je pourrai intervenir chaque fois que ce sera nécessaire.
Vive la démocratie !
Vive le dialogue et la concertation !
Vive Haïti !
Pour le pays, pour les ancêtres, marchons unis !
Je vous remercie.
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